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Le pouvoir a-t-il un sexe ?

 




Ce jour-là je me suis levé à cœur joie. Cela fait longtemps depuis que je n’ai pas vu Déchue, cette magnifique fille, drôlement belle, évidemment ange qui s’appelait en vérité Gaëlle. C’est moi qui m’amusais à l’appeler Déchue. Vous n’avez pas besoin de me demander pourquoi. C’est une longue histoire. La seule chose que je peux vous dire c’est qu’elle est enfin rentrée au pays après son doctorat en physique quantique en Allemagne. Je suis la première personne qu’elle a invité chez elle. Cela ne plaît pas vraiment à ma femme. Mais puisque je suis le chef, elle ne peut que se soumettre face à mes manières d’agir.

Donc j’y suis allé. Déchue est une belle femme noire, les cheveux aussi noir que le café, des lèvres violettes, charnues et apparemment délicieuses, le visage parfaitement proportionné, son estomac porte deux petites poires faites sur mesure, le ventre plat et des fesses modestes. Le tout fait d’elle une femme qui pourrait, à sa guise, se porter candidate au siège de Erzulie Freda au Panthéon des Dieux. Sa maison deux étages est celle digne d’une impératrice. Une jolie galerie découpée règne au premier étage, et une véranda projette sa cage de verre au milieu de la façade. Quand je suis arrivé, elle était assise sous sa véranda en train de boire un café. Quand elle m’a vu, elle s’est penchée sur la balustrade en secouant sa main. Une manière de me dire qu’elle descend me rejoindre et que je dois attendre.

Elle prit deux minutes à peu près pour me rejoindre. On s’est échangé de cordiaux baisers sur la joue avant de me conduire dans son somptueux salon de verre. Elle pressa un bouton, des canapés apparaissent.

_C’est de la technologie Hash, me dit elle.

Comme si elle pouvait lire dans mes pensées.

_Assieds-toi donc mon cher.

Je m'assieds. Elle s’assoit telle une reine dans son canapé.

_Comment vas-tu ? me demande t-elle.

_Ça va, lui répondis-je. D’un air peu interloqué. Et toi ?

_Je vais très bien merci mister. Comment va-t-elle ?

_Qui ?

_Ta femme ?

Je ne lui avais pas dit que j’étais marié. Comment a-t-elle su cela ? Je la regarde d’un œil interrogateur.

_Je sais que tu n’avais pas envie de me le dire Hash. Je sais que nous nous sommes quittés dans une situation peu commune. Moi j’étais pieuse, toi un Marquis de Sade.

Je racle un peu ma gorge

_Ceci est de l’histoire ancienne Déchue.

_Et dis donc, tu n’es plus fan du Marquis de Sade et de la philosophie libertine ?

Je n’ai pas trouvé nécessaire de lui répondre. Un silence embrassa toute la salle et on s’est mis à se regarder comme si on ne se reconnaissait pas. J’ai profité pour la regarder. Elle était tellement belle dans ce pantalon. Sa peau noire était encore plus fine et plus étincelante. Perdu dans cette femme, des souvenirs déferlent dans mon esprits. Ils me tourmentent, se fatiguent et finalement s’endorment dans un coin sombre de mon cerveau. Alors que je l’admirais, elle racla sa gorge et libéra tout d’un coup la salle de ce mutisme.

_Tu ne voudrais pas visiter mon laboratoire ?

J’acquiesçai immédiatement. Elle pressa un autre bouton sur son siège, le verre du mur s’ouvrit et nous pénétrâmes dans son laboratoire.

 

***

Nous nous étions rencontrés pour la première fois dans une émission de radio. Elle devait avoir 18 ans à cette époque. Moi 19. Quand nous sommes sortis ensemble, elle étudiait la physique à l'ENS. J’étais à la FLA. C’était toujours une guerre de lettres et de chiffres entre elle et moi. Comme elle aimait lire, elle était un peu intéressée à ce que je faisais. C’est pourquoi elle m’accusait toujours d’égoïste, parce qu’elle savait que je n’écoutais que dalle quand elle répétait devant moi ses exposés de physique. Elle m’accusait aussi d’être avec elle que pour le sexe. Mais pour cela, elle avait tort. C’est vrai qu’elle avait un beau cul, mais ce qui m’a fait l’aimer, c’est son intelligence. Depuis qu’elle m’a épaté à l’émission de radio.

« Hé ! Hash ! »

Je sautai de ma réflexion. En fait nous étions toujours dans son laboratoire ultrasophistiqué et je n’écoutais que dalle. Elle me fit un regard en retroussant sa bouche pour bien me faire remarquer que je n’ai pas changé depuis tout ce temps. Je ne l’écoutais pas. Et je dois bien admettre que la physique m’a toujours saoulé. Je continue ma visite malgré tout entre des termes, des chiffres et des schémas que je ne comprenais pas. Elle m’expliquais ce que l’homme pourrait faire s’il arrivait à maitriser la physique quantique. On pourrait se téléporter, en contournant la courbe de l’espace-temps, l’homme pourrait voyager dans le temps et créer des simulations extrêmement réelle en truquant la réalité. Tout cela m’intriguait un peu. Puis elle me présenta une machine.

_Je te présente Hash. La machine qui peut te propulser dans une réalité parallèle. Je l’ai appelé Hash en souvenir de ton poème, Un monde parallèle, que tu m’avais écrit la première fois qu’on avait fait l’amour.

Ce n’est pas cela que je lui avait vraiment écrit la première fois qu’on avait fait l’amour. Mais ce poème, je ne lui avais jamais donné. Trop érotique et elle détestait depuis toujours mon côté sadique. Je dois bien admettre qu’aujourd’hui j’ai changé, mais en pire.

_Comment tu sais qu’elle peut vraiment faire ce que tu dis ?

_Nous allons bientôt le savoir. Et c’est exactement pour cela que je t’ai fait venir.

_Moi ?

Je suis un peu choqué.

_Qui d’autre était plus passionné de science-fiction que toi Hash ! Tu te souviens que les seules choses que tu lisais sur la physique concernait le voyage dans le temps… Tu as écrit des tas de nouvelles à ce sujet pour moi. Je les ai toutes.

Elle pressa un bouton qui fit sortir un tiroir. Il y avait plus de 20 nouvelles. Toutes étaient écrites pas moi pour elle et toutes parlaient de science-fiction. Elle avait même gardé Mars et Vénus dans un train sur la lune. Elle les déposa sur une table afin que je puisse bien voir qu’il n’en manque aucune. Elle me raconta qu’elle les avait apportées en Allemagne et, quand elle était triste, elle les lisait. Mais ce qu’elle préférait de loin c’était Dans un monde parallèle.

_Donc l’idée de cette machine vient de moi ? lui demandé-je

_Hash, tu ne sais pas à quel point tu m’inspires. Toi qui as toujours tout réussi et avec qui j’ai vécu mes plus intenses moments.

Elle était proche de moi et caressait ma joue. Elle approchait ses lèvres des miennes quand j’ai tourné ma tête.

« Non, non et non ! » Je prends ensuite mon chemin pour entrer chez moi.

_Hash attend ! Et si je t’expliquais comment cela fonctionnait ? »

J’acquiesce.

«  Des physiciens de la physique quantique ont découvert que si on pouvait désintégrer l’homme à une taille microscopique, on pourrait enfin concrétiser la téléportation. Grâce à des cabines semblable à Hash, les hommes pourraient se déplacer à une vitesse assez proche de celle de la lumière d’un bout à l’autre de la planète. Cela remplacerait les avions, les voitures, les trains… ce qui garantira la suppression d’une grande partie des gaz à effet de serre lâchés dans l’environnement. Mais pour cela, il faut démontrer la théorie de Yang-Mills. Pour mieux comprendre, voici de quoi il en est :

Les lois de la mécanique quantique cherchent à expliquer l'infiniment petit, de la même façon que les lois de Newton s'appliquent au monde macroscopique. Il y a un demi siècle, Yang et Mills ont construits un modèle basé sur des théories géométriques pour décrire les particules élémentaires. Les prédictions qu'ils firent alors ont été testées dans de nombreux laboratoires et furent toujours vérifiées. Le fondement mathématiques de leur modèle reste cependant peu satisfaisant. Pour décrire l'interaction forte des particules élémentaires (c'est une des 4 forces fondamentales), la théorie de Yang-Mills fait intervenir une subtile propriété appartenant au monde de la mécanique quantique: en anglais mass gap : certaines particules quantiques ont une masse positive alors que l'onde associée voyage à la vitesse de la lumière. Cette propriété a été découverte par les physiciens de manière expérimentale et a été vérifiée par des simulations informatiques. Elle n'est par contre pas comprise d'un point de vue théorique. Les progrès relatifs à la théorie de Yang-Mills et à la propriété du gap d'énergie vont dépendre de la capacité des physiciens et des mathématiciens à introduire des points de vue nouveaux et fondamentaux à la fois en physique et en mathématiques. Henri Poincaré  Bernhard Riemann Yang et Mills.

 Cela permettrait de comprendre la réaction du particule X qui, en contournant l’espace-temps, peut permettre la réalisation de ce qu’on catégorise aujourd’hui dans la science-fiction. Eh bien mon cher, cela fait plus 2 ans que j’ai réussi à démonter cette théorie. J’étais en master aux États-Unis. J’ai pris 1 an pour fabriquer cette machine qui va révolutionner l’histoire de l’humanité.

_Eh bien va le présenter à l’académie des sciences. Tu auras un million de dollars. Tu seras millionnaire et célèbres.

_S'il te plaît Hash ! Fais le pour moi.

_Mais tu m’as toujours pas dit comment ça marche.

_La machine exploite ta dernière pensée afin de te propulser dans une réalité parallèle conforme à tes désirs. Si par exemple tu penses guerre quand tu es entré dans cette machine, elle te propulsera dans une réalité de guerre. Mais les stratégies, les gagnants… tout sera parallèle.

_Et pourquoi tu n’y vas pas toi-même ?

_Je dois rester pour surveiller la machine. S’il te plaît Hash, fait ça pour moi. Tu peux même penser à une notion de linguistique puisque tu es spécialiste en linguistique du langage. Voir ce que cela donnerait si le monde entier parlait une seule langue. »

Je reste silencieux, réfléchi.

« S'teuplé Hash ! »

Finalement j’accepte.

 

***

Une ribambelle d’images se défilent dans cette nuée de fumées bleutées. Hash émis des vrombissements sourds à des intervalles réguliers. Presque continus. Mes pensées s’entrechoquèrent. Je pensais à ma femme, ma fille, un monde où l’on parlerait une langue unique. Puis je devins tout d’un coup léger, je me sentais soulevé, la sensation qu’une force vitale s’efforçait  à quitter mon corps. « Je meurs ici et maintenant, » me suis-je dit. Mes pensées s’évaporèrent une à une et mon univers devient une vision floue de ce que je prenais pour ma réalité. Mes pensées s’efforcèrent à reprendre le dessus et une suite de vagues pensées rôdaient dans mon esprits, s’entrechoquèrent, se fatiguèrent puis moururent. Mes paupières devenues lourdes se fermèrent lentement. J’entendais des bips, comme le compte à rebours d’une bombe. « Timp, timp, timp, tintintintintin…timp. » Sexisme. Ce mot venu de nulle part, jaillit telle un éclair et traversa tout mon esprit. Et pis… je n’étais plus de ce monde. Bonjour mon monde parallèle.

 

***

Je me réveillai dans ma chambre et tout était rangé comme avant. Ma maison était rester la même. Mon salon octogone muni d’un écran plat, de quelques meuble de la renaissance, des photos de moi et ma femme en faculté de droit et de linguistique en Italie, durant notre cursus de doctorat, notre petite table de la Rome antique acheté à un antiquaire en Italie, sur laquelle il y a avait quelques livre. Ma fille avait toujours 15 ans. « Ce monde n’est peut-être pas si parallèle que cela, » me suis-je dis.

Je suis sorti sur la galerie. Il est 8 heures du matin et le livreur de journaux a déjà livré les miens. C’est  le K-Post, Kanperen Post, un quotidien qui diffuse toutes les nouvelles du globe. Je le prends et je le dépose au salon afin de le lire ce soir, quand je serais revenu du boulot. Je suis entré dans la douche, prendre un bain. Puis je m’habille avant de passer à la salle à manger. Constatant que ma femme n’a rien préparé à manger, je me suis mis à crier.

« HÉLÈNE ! »

Elle entre à la salle à manger, un peu consternée de me voir lui crier ainsi dessus. Elle me fait un regard qui semble me dire « Sa k pase w zanmi ? » Moi aussi j’étais consterné de la voir en tailleur, les cheveux en chignon et sur des talons hauts.

_Mais où vas-tu comme ça ? demandé-je

_J’ai une importante affaire au tribunal ce matin.

_Quoi ? Et qui t’a permis d’aller bosser ?

_Personne, me répond t-elle sèchement. Je crois c’est une décision personnelle que les femmes prennent dans toutes les sociétés du monde. À part quelques sociétés aborigènes où le patriarcat est acceptable.

_Tu sais ? Tu n’iras nulle part.

Hélène est saisie.

_Mais qu’est-ce qui te prend Hash ? Depuis quand que c’est l’homme qui donne des ordres à sa femme ? As-tu envie de te faire fouetter ?

Je ne comprenais pas. Mais c’est une blague. Hélène ose me traiter en inférieur. Je ne pouvais pas accepter cela.

_Bon d’accord ! Je vais au bureau. Ce soir, on verra si tu es toujours aussi impertinente.

_Au bureau ? Hier j’ai appelé ton directeur pour lui dire que je ne veux plus que mon homme travaille. Roxane en souffre. Elle n’a que 15 ans. Il faut que tu sois à la maison pour l’assister, lui faire à manger, l’emmener à l’école…

Je ris. J’émets un rire fort et strident. Ce genre de rire qui la fait fuir habituellement. Mais elle n’a pas bougé d’un pouce.

_Ce que je te fais là n’est pas illégal chéri. C’est une loi voté avant-hier, le 2 avril et déjà publiée dans Le Moniteur. K-Post devrait en parler aujourd’hui.

Puis sans se prêter attention aux plis qui sillonnaient mon visage, elle rentre au salon, embrasse Roxane, et sort par la baie vitrée qui ouvre sur la galerie. J’entends vrombir un moteur, sans doute ma Mercedes-Benz, qui s’éloignait progressivement. Et la maison sombra dans un mutisme inquiétant.

Assis sur le canapé dont la face se donne sur la télévision, je ronge mes ongles en essayant de faire le point sur ce qui venait de passer. Je ne pouvais pas croire qu’Hélène venait de défier mon autorité naturelle de mâle. Depuis que nous sommes mariés, depuis 11 ans, jamais elle n’avait exercé le Droit. Je l’en interdisais et elle m'obéissait. Et quand elle osait riposter, un regard suffisait à lui rappeler à l’ordre. Quelques baffes dans quelques situations extrêmes. Mais aujourd’hui elle semblait vraiment s’affirmer.

Mon journal à proximité, je décide d’y jeter un œil dans les grands titres. La Une me surprenait grandement : La loi du 2 avril 2021 : désormais les hommes ne pourront travailler que s’ils arrivent à obtenir un permis de leurs femmes. Hélène ne mentait pas. Je ne comprenais pas. Est-ce que les hommes tombent désormais enceinte ? Est-ce qu’on se baisse pour faire pipi ? Toute une panoplie de questions me tourmentait. J’ouvre donc la télé sur RTV79MONDE, des grands titres, tous m’exaspéraient :

« Hier soir au Palestine : la mort d’un homme par sa femme car il refusait de porter le voile. »

« Les masculinistes en France, toujours entrain de réclamer l’égalité des salaires. »

« Aux États-Unis : Max, jeune homme de 28 ans, mort sous les coups de sa femme. »

« Selon l'ONU, la vague de violences faites aux hommes est alarmante. »

« 3 hommes sur 5 tués par leurs femmes : jusqu’à quand l’égalité entre les sexes? »

« Haïti : un homme battu à mort par sa femme à cause d’une infidélité. »

« Guadeloupe : un prostitué blanc assassiné par une misandre arabe raciste. »

« Sexisme : les hommes réclament que les femmes prennent en compte leurs travaux domestiques. »

J’éteins donc la télévision en essayant de faire le point.

 

***

Le minuteur sur mon bras gauche indiquait 12 heures trente-cinq. C’est le temps qu’il me reste à passer dans ce monde hyper-sexiste à ce qu’il paraît. Fallait donc décider si je vais me rebeller et créer la révolution du siècle dans cet univers parallèle ou si je vais m'accommoder afin de mieux comprendre son fonctionnement. Le deuxième choix m’a semblé plus judicieux. Alors je me décide à préparer Roxane pour l’école.

Je la lavai, l'habillai et la nourris. Ensuite, comme d’habitude, elle fait un gros câlin à papa. Il paraîtrait que dans ce monde, c’est la « Toi et Moi » de Hélène qui soit la mienne. Je m’assieds au siège du volant et ma fille se tient sur le siège d’à côté. J’allume la radio sur RTV79Monde, on diffuse en direct l’émission ultra-patriarcale VNC, « Vive Nos Couilles. » que j’aime beaucoup écouter. Dans l’émission d’aujourd’hui est invité le linguiste Draréh qui s’exprime sur la règle ultra-sexiste de la grammaire française : Le féminin l’emporte sur le masculin.

_Bonjour Draréh et bienvenue dans cette émission Vive Nos Couilles diffusée tous les lundis sur RTV79Monde. Vous êtes sociologue, linguiste et masculiniste. Vous êtes pour la révision de la règle de grammaire qui stipule que le féminin l’emporte sur le masculin dans le cadre de l’accord de l’adjectif.

_Bonjour Joce et merci de m’avoir invité dans cette émission. Et oui ! Je suis contre cette règle qui veut nous faire croire que le féminin l’emporte sur le masculin.

_Oui Oui ! C’est d’ailleurs une vague de protestations commencée il y a trois ans. Il y a de plus en plus d’hommes français et francophones_et même des femmes_qui rejoignent le mouvement. Mais pourquoi, selon vous, une affaire de langue arrive à créer une protestation d’une telle ampleur ? Car c’est plus de 2 millions de francophones qui veulent la révision de cette règle d’après le sondage du bureau de la langue française du Québec.

_La raison est que la langue, comme beaucoup de gens pourraient le croire, n’est pas un simple outil de description du monde. Elle est aussi agente. Oui Oui ! La langue agit. Elle est pragmatique, ce qui veut dire qu’elle a un pied dans la réalité. Elle peut tout aussi être influencée et influencer la société. Donc enseigner à l’école primaire que le féminin l’emporte sur le masculin c’est faire de nos filles des tyrans sans affection. C’est aussi les pousser à prendre les hommes pour de simples objets. Parce que oui, la langue peut être outil soit d’inclusion ou d’exclusion.

_Merci Draréh ! Mais il paraît que cette règle ait existé depuis longtemps et qu’elle est aussi âgée que la langue française.

_C’est ce qu’on pourrait croire, mais non ! le féminin de l'a pas toujours emporté sur le masculin. Cette règle a vu le jour au moyen-âge. Dans la même société où le clergé fait de femmes voyait en l’homme une figure faible qui s’est laissé influencer par la femme au jardin d'Éden. La papesse Jeanne XII, dans son livre, Dieu est une femme, a même déclaré : « La femme a toujours été une figure d’autorité et est faite pour diriger. Dieu est une femme qui donne vie et qui a créé tout. C’est pour cela que la nature a décidé que c’est la femme qui porterait l’enfant, car c’est elle qui sait comment en prendre soin et qui peut mener à bien ce projet qui est de perpétuer l’espèce humaine sur terre. » Donc de ces idées préconisées par le Saint-Siège même, la société de l’époque dogmatisée à vu l’homme comme un être faible, le sexe méprisable. C’est donc ainsi, Joséphine de Paris, une courtisane de la reine Marie de Toulouse, a imposé la règle qui stipule que le féminin l’emporte sur le masculin. Au XIV, XVe siècle. « Lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte, » a-t-elle affirmé. Une autre noble nommée Marie de Rouen affirmait : «  Le genre féminin est réputé plus noble que le masculin à cause de la supériorité de la femelle sur le mâle.»  Donc voici comment la règle est née. Dans la cour de la reine Marie de Toulouse.

_D’accord ! Je comprends. Mais s’il n'y avait aucune règle avant cela, comment faisait-on pour accorder ?

_Les auteurs recouraient donc à l’arbitraire. Certains accordaient toujours avec le masculin tandis que d’autres faisaient le contraire. D’autres balançaient entre l’accord avec le masculin et le féminin. Mais il faut souligner aussi que les plus savant utilisaient l’accord de proximité.

_L'accord de proximité ? Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agit ?

_En français ancien, l’accord de proximité permettait d’accorder l’adjectif en genre et en nombre, avec le nom qui soit le plus proche de l’adjectif, qu’il soit féminin ou masculin, singulier ou pluriel.  Le Grand Dictionnaire des lettres (Larousse) souligne qu’en latin il en était de même : « Au latin remonte l’accord de l’épithète, s’il y a plus d’un nom support, avec le plus rapproché, précise l’ouvrage. Cet usage domine (irrégulièrement) en ancien français. »  La langue du Moyen-Âge pratiquait ordinairement l’accord avec le donneur le plus proche, confirme l’ouvrage de Grevisse. Les auteurs du XVIIe et même ceux du XVIIIe suivaient encore assez souvent l’ancien usage. Donc on pouvait dire, et ce n’était pas une faute, les femmes et les hommes sont beaux. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Depuis la reine Marie de Toulouse, toutes les souveraines de France ont voulu que le féminin l’emporte. Jusqu’à ce que l’académie française l’officialise.

_Ce qui est plus arbitraire que linguistique.

_Bien-sûr.

_Merci Draréh. Restez brancher. Dans deux minutes, l’historienne Lubie va nous parler de la petite histoire du masculinisme.

J’écoutais avec beaucoup d’attention l’émission quand ma fille me fit sursauter.

_Papa, pourquoi maman est-elle ta cheffe ?

_Où as-tu appris cela ma chérie ?

_Ce dimanche, quand nous étions allées à l’église moi et maman. La pasteure avait lu 1 corinthiens chapitre 11 le verset 3.

_Et ?

_Il dit : « Il faut que vous sachiez que le chef du Christ c’est Dieu, le chef de la femme c’est le Christ et la femme est la cheffe de l’homme. »

_Ah bon !

_Oui Oui, sourit-elle. Je suis une cheffe.

Mes pensées se bousculaient trop. J’ai donc préféré de l’ignorer. Mais j’aurais voulu lui faire savoir que les Amazones était une tribu guerrière composée uniquement d’hommes. Qu’il y avait eu des hommes qui se sont distingués dans la guerre de l’indépendance de notre pays. Qu’il y avait aussi eu des hommes pirates qui ont fait trembler toutes les reines et impératrices de leur temps… mais bon ! Mes pensées me préoccupaient trop et nous étions déjà arrivés à destination.

Elle m’embrasse et on se souhaite une bonne journée. Je remonte dans ma voiture et reprends la route aussi songeur que quand j’étais avec ma fille. À environ cinq kilomètres de son école, il y a une taverne. Je m’arrêtai un moment afin de prendre une bière.

_Un King, demandé-je au serveur.

Il me regarde un peu drôle. Je me sens un moment comme une pute, un saint dans le neuvième cercle de l’enfer de Dante Alighieri. Des femmes me sifflent à droite, à gauche. Mais je ne me préoccupaient pas d’elles. Une conversation attirait vachement mon attention. Deux femmes étaient assises dans un coin de la taverne entrain de se discuter. Elles semblaient être toutes deux dans la quarantaine. L’une d’elles semblait être très contrariée.

_Mon fils est un pute, dit-elle à l’autre. Il se laisse faire par toutes les filles du quartier. Je n’en peux plus. J’ai tout fait pour lui expliquer comment il se dénigre, mais il ne m’écoute pas.

L’autre femme n’était visiblement pas compatissante. Elle regardait le plafond en montant ses sourcils d’un air désinvolte, se retroussait la bouche… Ce qui me fait croire qu’elle ne voit aucun mal à cela. Et j’avais vu juste.

_Et ta fille, ça te dérange qu’elle couche avec les garçons du quartier ?

_Mais faut comprendre Jully ! Elle, c’est une fille. La société ne va pas la juger. D’ailleurs elle me ressemble un peu quand j’étais jeune.

_Mais personne n’a le droit de juger personne. Ton fils à aussi le droit de s’envoyer en l’air avec qui il veut.

_Mais aucune fille du quartier ne va le prendre pour homme. C’est un trainé.

_La virginité n’est pas une vertu. Voila ce que tu dois apprendre à ton fils.

Sur ma troisième bière, elle me pointa du doigt.

_Regarde cet homme là-bas. Bientôt il sera à sa quatrième bière. Il s’en fout des codes de la société qui veut faire croire qu’il y a que les femmes qui ont le droit de se soûler.

Je lui souris et je commande une quatrième bière. Mais le garçon me refusa. Je le regarde consterné. Mais il semblait être sérieux. Je lui répéta encore ma commande, mais il était impassible, froid face à ce que je lui disais. Je me suis donc mis à taper sur le comptoir afin qu’il sort de son mutisme. Cela fait sursauter toute la taverne. « Quel trainé, » j’entends dire une femme. Le garçon me regardait avec des yeux de volcan, tant ils étaient enflammés. On s'attendrait à ce que de la lave en jaillisse. C’était un beau mec bien construit, habillé avec une chemise aussi blanche que des dents de zombis qui laisse paraître ses muscles, et nœud de papillon noir. Il me prend la tête et me dit :

« Pourquoi tu te soûles ? Vois-tu pas que tu ressembles à un traîné, un salope, un pute ? Tu n’es pas obligé de faire comme les femmes pour te sentir égal d’elle. Ta tronche ressemble à celle d’un masculiniste. Moi aussi je suis un. Mais j’essaie d’être moral.

_Ta morale n’est pas la morale. Celle de cette putain de société non plus. »

Puis je sors de la taverne saoule et sans destination.

 

***

La nuit est tombée. Devant la télévision, Roxane sur mes cuisses s’endort. Je la porte jusqu’à sa chambre. Ses yeux s’ouvrent et elle me demande de lui raconter une histoire. Je la regarde avec un sourire afin de lui signifier qu’il était tard, mais elle insista. Alors je lui raconte l’histoire la plus folle que j’ai jamais vécue.

« Il était une fois, un jeune homme marié vivait dans un monde profondément sexiste…

_Comme le nôtre papa ? me coupait-elle.

_Si ! Comme le nôtre. Mais c’était les hommes qui dirigeaient les femmes.

_Oh ! Que c’est triste !

_Chut ! Veux-tu que je te raconte l’histoire ?

Elle acquiesce. Et je continue.

_ Dans ce monde là, les femmes étaient battues, violées, maltraitées, placées au second rang de la société maintenue pas des hommes. Un jour, une femme, une physicienne qui se nomme Gaëlle entreprit de créer en secret une machine qui pourrait inverser les choses. Une machine, qui d’un seul clic pourrait changer le cours de l’histoire. Alors elle l’a fait. Un jour elle le fit essayer à un jeune ami, un ancien amant, le jeune marié dont je te parlais. Il était linguiste et particulièrement concerné à la cause des femmes. Luttait pour leur épanouissement. La machine peut projeter n’importe qu’elle personne dans une réalité parallèle en se basant tout simple sur sa dernière pensée. Et devine quelle était sa dernière pensée ?

_Euh… La langue unique ! Comme il était linguiste comme toi papa.

_Sexisme. Sexisme était sa dernière pensée. Alors la machine le projette dans notre réalité. L’inverse de la sienne. La femme n’étant plus oppressée devient oppresseur. Et rien avait en fait changer dans le monde. Les mêmes inégalités existaient, sauf que ce n’était plus la même catégorie de gens qui tirait les ficelles.

_Et qu’est-ce qui est arrivé au jeune homme marié ?

_Il ne pouvait pas supporter que sa femme soit sa cheffe. Et commençait à se questionner sur plein de versets de la bible qui faisaient de certaines catégories de gens des créatures de seconde zone. Car dans son monde parallèle, il était évidemment de seconde zone. Et c’est pour cela qu’il remettait en cause toutes les bases de la société.

Le minuteur sur mon bras gauche affichait trente secondes. J’ai donc coupé brusquement l’histoire en lui promettant que je la lui raconterai le reste demain. Je l’embrasse et lui souhaite une bonne nuit. En me tournant, Hélène était au pas de la porte, en train de me regarder. Sa tête était légèrement penchée à gauche et elle me souriait.

_Combien de morceaux de son cœur un homme peut-il perdre avant de mourir de chagrin ? me demande t-elle.

Mais mon corps se soulevait déjà et mon esprit voguait dans l’atmosphère. L’air devenait bleu et un tas de vieux comportements se croisèrent dans ma tête. Je commençais à me sentir homme, chef. Une petite voix sonnait dans ma tête : sexisme. La dernière pensée qui m’a emmené ici serait la même qui m’accompagnera dans l’autre monde. Je fermai légèrement mes paupières puis j'atterri dans un endroit froid, des fumées bleues et des ronronnements sourds. Il me fallait un peu de temps pour comprendre que je me trouvais dans la machine de Gaëlle. Il y avait un bouton rouge sur lequel était écrit exit. Alors j’appuie là-dessus et la porte s’ouvrit.

La pièce était vide et l’horloge sur le mur indiquait 2045.

_Gaëlle ?

Mais personne ne m’a répondu. Alors j’ai continué à faire le tour de la pièce. Il y avait de nombreuses équations et démonstrations sur les tableaux, des feuilles de papiers étaient éparpillées partout dans la pièce et dans un coin, les tas de nouvelles que je lui avait écrites. J’ouvre le manuscrit Mars et Vénus dans un train sur la lune. Une inscription signée Gaëlle m’attira l’attention : Pour l’amour d’un homme et d’une idée. Est-ce de moi qu’elle parle ? Un peu plus loin je remarquai un enveloppe sur lequel était écrit : Pour Hash ! Je l’ouvre et je remarqué une lettre datée du 8 octobre 2021 qui comportait une phrase. Une unique question. Et un mot d’amour.

Combien de morceaux de son cœur un homme peut-il perdre avant de mourir de chagrin ? Je t’aime Hash !

Là j’ai su qu’elle y était avec moi et qu’elle y est restée. Mais pourquoi ? Je savais maintenant ce que je devais faire.

 

Note : Je ne suis pas sur que la théorie de Yang-Mills a un rapport avec le voyage dans le temps. Je l'ai juste mis comme ça vu ce n'est qu'un détail. 


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  Toujours autant passionné de culottes, Hash se demande pourquoi les femmes ont tous ces modèles de culottes les unes très différentes des autres. Habité à côté d'une littéraire, cousine de son ex, Hash sera enseigné par elle... Tout cela entre ses seuls témoins :  des bougies. Ils se lancent alors dans un jeu sexuel où chacun essaie de remporter la partie dans les règles de l'art Pour lire la première partie, cliquez ici . Première leçon… 04 Août 2021 21 heures 30   À cette première leçon, ma chambre est à la 50 nuances de Grey, sauf qu’il n’y ait pas de fouets et tous les instruments de sadomasochisme. Le tapis qui couvre le sol est d’un rouge vif, la chambre est sombre, éclairée juste par des bougies de toutes les dimensions et de toutes les odeurs. Sur mon bureau est posé les trois tomes des 50 nuances de El James, et deux Marquis de Sade :   Les cent vingt jours de Sodome et la philosophie dans le boudoir, une copie de ce que les culottes disent, un bloc de feuilles

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  "Toujours autant passionné de culottes, Hash se demande pourquoi les femmes ont tous ces modèles de culottes les unes très différentes des autres. Habité à côté d'une littéraire, cousine de son ex, Hash sera enseigné par elle... Tout cela entre ses seuls témoins :  des bougies. Ils se lancent alors dans un jeu sexuel où chacun essaie de remporter la partie dans les règles de l'art" Afin de lire la partie pprécédente, cliquez ici Les douze coups de minuit sonnent en même temps que la sonnette de chez moi. Ma chère voisine se tient devant ma porte avec une jolie robe en soie, les cheveux en afro et à ses oreilles pendent de jolies créoles des Antilles. Sans avoir attendu que je l’invite, elle pénètre dans le salon puis se retourne, me regarde en mordillant ses lèvres. Miaulant d’une manière très bizarre, elle saute à mon coup et m’embrasse avec une telle violence mélangée à une telle passion que dans l’instant, je me suis senti partagé entre deux mondes. En fin de com